< 1914 - La blessure >
27 septembre
1h du matin nous allons vers notre cantonnement lorsque nous entendons une clameur formidable sur notre droite - les allemands sont aux prises avec le 28 à Villers Franqueux - un capitaine d'artillerie arrête le 74 et nous emmène à l'assaut - Les balles perdues sifflent salement nous arrêtons à 50 mètres du village et couchés à travers les routes nous attendons l'ennemi qui ne vient pas.
3h au matin coucher -
4h du matin rassemblement, descente à Thil pour le ravitaillement - nous remontons à l'abri du ravin entre Thil et Pouillon - l'artillerie de part et d'autre montre assez bien d'activité -
4 1/2 du soir je suis touché à la cuisse gauche par un éclat d'obus, mon camarade de combat, un nommé Collé de Luneray vient à mon secours et me panse -
6h 1/2 je quitte le terrain pour trouver le poste de secours, je rampe quelques mètres mais je ne vais pas loin, heureusement arrive une corvé d'eau qui me transporte jusqu'au poste - 1er pansement, pas d'infirmier et coucher dans une étable.
11h changer de pièce pour faire place aux autres, je suis très fièvreux et bois sans raison. Heureusement il n'y a plus d'eau dans mon bidon, je ne boirai plus.
28 septembre
6h du matin je n'ai pas dormi, j'ai eu trop froid , je ne peux pas m'allonger, ni replier la jambe, mais je nesouffre pas trop, on va m'évacuer; pour cette fois j'ai la vie sauve. 7h nous partons à 6 sur une charette vers l'ambulance de Chenay - Là une tasse de bouillon - un pansement - et en autobus je gagne la gare de Mouizon on me couche par terre avec d'autres blessés et j'y reste de 11h à midi, l'heure qu'on commence à former le train. A 2h le train s'ébranle , je pousse un soupir de soulagement car j'ai hâte de me faire enlever ce qui m'est entré dans les chairs.
29 septembre
La nuit s'est passée tant bien que mal, nous n'avons qu'un souci, c'est l'arrivée à l'hôpital. Nous passons Château-Thierry et apprenons que nous allons dans le Loir et Cher - A Blois le train se dédouble et je vais à Romorantin -
A 11h du soir arrivée. Ce sont les premiers blessés qui sont dans cette ville, et tout le monde est sur pied pour nous attendre. Je suis dirigé sur l'hôpital 17 et couché sur un bon lit. C'est la 1ère fois depuis que j'ai quitté mes très chers, une raison de plus pour penser à eux.
30 septembre
Trop bien couché je n'ai pas dormi; toue la nuit j'ai pensé à Bruxelles - A 7h on nous apporte le café au lit et à 9h pansement.
Jusqu'au 8 octobre il n'y a rien à noter. Je suis dans un milieu de brave gens - exessivement bien soigné etcomblé de douceur.
8 octobre
7h jeûne - 10 h on doit m'opérer - couché sur la salle et sous chloroforme - Les médecins m'éveillent sans m'avoir rien fait, sous prétexte qu'ils ne connaissent pas assez bien l'emplacement du projectile et ils décident de me passer à la radiographie.
10 octobre
Le major Baudequin essaye de me retirer l'éclat d'obus avec une pince, mais celui-ci est rugueux et s'accrocha aux chairs, le médecin n'insiste pas.
12 octobre
Piqûre à la cocaïne sur le côté intérieur de la cuisse, ouverture et extirpation d'un petit morceau de fonte. Me voilà débarrassé.